Victor Kessler n’a pas tout dit, Cathy Bonidan

Dans les affaires personnelles d’un vieil homme dont elle a fait la rencontre fortuitement, Bertille découvre la confession écrite par un certain Victor Kessler, qui a été emprisonné pour le meurtre d’un enfant commis des dizaines d’années auparavant, dans un village de l’est de la France. Happée (tout comme le lecteur) par cette histoire, elle veut en en savoir plus et se lance dans une enquête. Pour cela, elle va devoir retourner dans sa région d’origine…

Quête de vérité, culpabilité, fait divers tragique, des secrets qui en cachent d’autres, très enfouis… J’avais eu un immense coup de cœur pour Le Parfum de l’Hellébore, et j’ai retrouvé avec plaisir la plume de Cathy Bonidan dans une histoire se rapprochant cette fois d’une enquête policière où les questions viennent s’accumuler, pas seulement pour Bertille mais pour nous lecteurs : si elle commence à émettre des doutes sur la culpabilité de l’instituteur et à se demander pourquoi diable il aurait endossé la responsabilité d’un crime qu’il n’a pas commis, on se demande pour quel véritable motif elle s’est lancée dans cette recherche venue réveiller bien des souvenirs douloureux restés enfouis dans les Vosges. Un roman qui tient en haleine jusqu’à la dernière page. 

VICTOR KESSLER N’A PAS TOUT DIT, Cathy Bonidan, Editions La Martinière

{Coup de ❤} La Brodeuse de Winchester, Tracy Chevalier

1932. Violet Speedwell a quitté Southampton, une mère aigrie et le souvenir d’un fiancé et d’un frère disparus pendant la guerre pour tenter de commencer une nouvelle vie à Winchester. Mais son statut de célibataire en fait l’une de ces femmes méprisées et critiquées car considérées comme « excédentaires » (!!), et elle a beaucoup de mal à joindre les deux bouts malgré un travail de dactylo dans une compagnie d’assurances. Elle intègre un cercle de brodeuses pourtant très fermé, en charge de confectionner coussins et agenouilloirs pour la cathédrale de Winchester…

Tracy Chevalier excelle à peindre des personnages de femme évoluant dans des domaines méconnus, comme les chasseuses de fossiles du magnifique « Prodigieuses Créatures« . Cette fois, elle nous invite à découvrir l’art de la broderie, mais pas seulement : on sortira également de sa lecture en ayant acquis des rudiments de campanologie, car c’est d’un sonneur de cloches que Violet va s’éprendre et pour lui qu’elle arrivera à ne plus se préoccuper de sa condition de célibataire désargentée s’attirant les quolibets. C’est aussi au sein du groupe de brodeuses qu’elle trouvera amitié, réconfort, solidarité.

« Des petites choses naît la grandeur » : il est important de ne pas négliger l’importance de ces travaux de couture à la fois pour ceux qui vont en profiter et pour celles qui les accomplissent, ni l’importance des thèmes représentés, historiques ou religieux, et des nuances de couleurs repérées par un œil exercé. De la même manière qu’un point de croix incorrect peut fausser tout un travail, Tracy Chevalier raconte de fort jolie manière à quel point l’appartenance à un groupe et l’expression de sa créativité peut donner de l’harmonie à l’existence.

LA BRODEUSE DE WINCHESTER, Tracy Chevalier, Editions La table Ronde

Les Jours Brûlants, Laurence Peyrin

Joanne mène une vie paisible à Modesto en Californie, aux côtés de son mari médecin et de ses enfants, jusqu’au jour où une agression vient chambouler son existence. Après cet Incident elle sombre peu à peu, au point d’effrayer sa propre famille. Elle décide alors de prendre la fuite.
Qu’est-ce qui fait qu’un jour, quelqu’un décide de disparaître ? Vouloir protéger ses proches de soi au point de préférer les quitter, sans prévenir ni s’attarder sur les conséquences ? Joanne voudrait effacer ce qui lui est arrivé et recommencer à zéro comme on commence une page blanche, et cette nouvelle vie c’est à Las Vegas qu’elle va la démarrer.

Elle y trouvera un refuge inattendu et inespéré dans une boîte de strip tease où échouent des femmes blessées comme elle auxquelles on ne demande rien de leur passé. Quel décor fou que la cité du jeu et du péché dans les années 70 ! Joanne s’accoutumera rapidement à la faune qui vient visiter le bar dont elle va vite avoir la charge et, contre toute attente, y trouvera le nouveau souffle qu’elle recherchait. Au-delà de ces beaux personnages de paumés qui ont tous échoué à Las Vegas et de la légèreté induite par ces recettes de cocktails qui rythment le roman, l’auteure sonde subtilement la déflagration des dégâts causés par une agression dans une très belle histoire de femmes et d’humanité.

LES JOURS BRÛLANTS, Laurence Peyrin, Calmann-Levy

Mamma Maria, une envie d’Italie

« Tenir un bar dans ce tout petit village depuis plus de quarante ans, c’est un peu devoir être la mamma de tout le monde ».

Et c’est d’une main de maître et avec une voix généreuse que Maria règne sur le petit monde qui gravite autour de sa terrasse : les vieux, les ados, les habitués, les touristes, elle les connaît tous, leur vie, leurs habitudes, leurs changements de vie aussi, comme Sofia, qui vient de rentrer de Paris et se demande encore si elle a bien fait de quitter son compagnon.

Impossible de ne pas avoir des envies d’Italie (et de côte amalfitaine en particulier) après avoir refermé le livre, tant la générosité et l’exubérance italienne nous sont chaudement racontées avec une tendresse infinie. Une histoire rythmée par de courts chapitres alternant le point de vue de Maria, qui n’a encore jamais quitté son village, et celui de Sofia, qui est partie voir ailleurs et en est revenue. Mais au milieu de cette félicité pointent aussi des drames humains et l’occasion de faire évoluer des points de vue ancestraux dans un esprit d’entraide et de bienveillance. C’est touchant, ultra vivant et souvent très drôle (le duel entre Maria et sa belle-fille m’a régalée), un excellent moment passé à la terrasse à observer tous ces personnages haut en couleurs en sirotant un Amalfitano.

MAMMA MARIA, Serena Giuliano, Cherche-Midi

LIRE POUR S’ÉVADER #6

Existe-t-il un écrivain dont l’oeuvre et la personnalité ont autant marqué de son empreinte son entourage, ses femmes et sa descendance qu’Ernest Hemingway, au point même de parler de malédiction ? Difficile dans ces conditions de trouver sa place au sein du clan… c’est de son troisième fils que parle « Le Secret Hemingway » : née Gregory, elle mourut sous le nom de Gloria dans un centre de détention pour femmes où elle était incarcérée pour attentat à la pudeur. C’est depuis ce centre que Gloria revient sur son existence, enfant chéri par son père et mal aimé par sa mère, sa conscience d’être née fille dans le corps d’un garçon, sa difficulté à revendiquer son existence face à l’image colossale du père auquel on la ramenait systématiquement. Médecin, marié quatre fois, père de huit enfants, Gregory attendra que ses enfants soient grands avant de devenir officiellement Gloria. Une trajectoire forcément douloureuse (on ira jusqu’à lui reprocher d’avoir tué sa mère, son père… et le chien), forcément bouleversante, forcément courageuse, où il n’est pas seulement question d’identité et de différence mais aussi beaucoup d’amour. 

LE SECRET HEMINGWAY, Brigitte Kernel, Flammarion

Une petite ville du Texas au milieu du désert. Austin a quinze ans et vit avec ses parents et sa sœur Abilene. Il est fasciné par cette grande fille exubérante et souvent incontrôlable, partageant avec elle une dévorante passion pour le base-ball. Il ne réalise que peu à peu qu’Abilene souffre de troubles mentaux et l’impact que cela a sur leur famille…
Nul besoin de maîtriser les règles du base-ball (au vocabulaire abscons très présent) pour plonger dans cette histoire familiale très forte. Frère et sœur sont fusionnels en dépit des fréquentes disparitions inexpliquées d’Abilene, mais alors que la situation devient de plus en plus tendue, et tandis que leurs parents se battent pour venir en aide à leur fille du mieux qu’ils le peuvent, quitte à incarner l’ennemi aux yeux de leurs enfants, Austin s’efforce de soutenir sa sœur du mieux qu’il le peut et de réaliser ses rêves à sa place. Comment aider quelqu’un qu’on aime malgré lui ? Comment ne pas se sentir impuissant et dévasté face à la maladie qui l’emporte ? Dans un décor aride et guère avenant, Pete Fromm plante ses personnages décrits avec justesse et sans fioriture, comme s’il n’y avait plus rien d’autre que la force des liens qui unissent cette famille abîmée. 

COMMENT TOUT A COMMENCE, Pete Fromm, Gallmeister

Un repas de famille qui s’étire avec ses codes immuables et ses passages obligés, au milieu duquel Adrien ressasse, la tête ailleurs : pourquoi sa sœur lui offre-t-elle toujours des dictionnaires ? Pourquoi sa mère sert-elle toujours un gâteau au yaourt pour le dessert ? Et surtout, pourquoi Sonia ne répond-elle pas à ses textos ? A tout cela il faut désormais ajouter une requête dont il se serait bien passé : faire un discours au prochain mariage de Sophie…
L’humour des dessins de Fabcaro c’était déjà un délice, alors un roman… ce sera difficile désormais de ne pas éclater de rire devant les prochains cadeaux de fête des mères faits main ou face à une festive chenille humaine. De fil en aiguille, l’esprit d’Adrien s’égare et s’échappe de ce repas soporifique bercé par des considérations sur le chauffage au sol ou la tarte poires-chocolat, autant de digressions piquantes et un brin dépressives tournant autour du chagrin d’amour de ce quadra désabusé. Si ma préférence va toujours à ses dessins, un livre qui fait franchement rire c’est une belle réussite !

LE DISCOURS, Fabrice Caro, Folio

Lire pour s’évader #5

Joseph Ferdinand Cheval est ce fameux facteur, célèbre pour avoir passé 33 ans de sa vie à édifier un merveilleux palais dans son village de la Drôme, un endroit dorénavant classé Monument historique. Je n’ai jamais eu l’occasion de m’y rendre mais la curiosité suscitée par le roman de Nadine Monfils est grande ! En se basant sur ce que l’on sait du Facteur Cheval et beaucoup de ses propres citations, elle prend la plume à sa place pour écrire des lettres éclaircissant les motivations de son pari fou. Elle raconte la douleur d’un père qui a perdu sa fille et se raccroche à ses rêves pour ne pas sombrer complètement, sans jamais se soucier de ceux qui glosent sur lui, et dresse le portrait d’un homme modeste, taiseux, pudique et sage qui a trouvé un moyen extraordinaire de s’élever au-dessus du malheur. C’est très poétique et tendre, ça donne envie d’en savoir bien plus car le livre est vraiment bref.

LE RÊVE D’UN FOU, Nadine Monfils, Fleuve Editions

XIXe siècle. John Cyrus Bellman vit avec sa petite fille Bess dans une ferme de Pennsylvanie, encore sous le coup du chagrin d’avoir perdu son épouse. La lecture d’un article de journal va provoquer un déclic et le pousser à partir à l’aventure en laissant tout derrière lui.
C’est un très étrange roman racontant l’épopée d’un homme parti à la recherche des ossements d’animaux fantastiques, guidé par un jeune indien à la façon de Don Quichotte et de son Sancho Pança. Pendant ce temps, sa fille guette son retour en s’efforçant de suivre son aventure dans les livres, mais va comprendre qu’il n’est pas nécessaire de voyager loin pour rencontrer des monstres.
C’est bel et bien un conte symbolique à tous points de vue (Où se trouve notre maison ? Qu’y a-t-il de plus important ?) qui nous fait traverser l’ouest sauvage dans une quête impossible à la morale cruelle.

WEST, Carys Davies, Seuil

Julia vient de dégoter le job de ses rêves : elle est chargée de tester et évaluer des voyages aux quatre coins du monde. Avec sa nouvelle bande de collègues, c’est le début de l’aventure… En ce moment ce qui nous manque à tous c’est de changer d’air et une grande dose de bonne humeur, ça tombe bien grâce à Un été en Hiver nous voilà servis : ça voyage et ça pétille à chaque page !
Certes, Julia est parfois agaçante, elle a le chic pour se faire des nœuds au cerveau en permanence et avoir le béguin pour la mauvaise personne, mais c’est ce qui rend cette Bridget Jones si attachante – et si proche de nous. On est loin des personnages de comédie romantique trop lisses, et heureusement. Avec Julia on ne s’ennuie pas, surtout quand elle embarque pour un voyage épique à bord d’un paquebot de type immeuble flottant qui va être l’occasion de quelques révélations. Un roman tendre, drôle et dynamique comme une chanson populaire. 

UN ÉTÉ EN HIVER, Solène Hervieu, City Editions

Lire pour s’évader #4

Eddie vient d’hériter d’une mystérieuse ferme en ruines dans la région de Sicile en Parme. Comme elle n’a rien à perdre, ni famille ni amis ni boulot, elle se rend sur place avec l’idée d’y rester et peut-être même commencer une nouvelle vie.

Si on vous offrait la possibilité, clefs en main, d’envoyer valdinguer une existence morne, est-ce que vous ne sauteriez pas sur l’occasion ? Eddie s’interroge pourtant plus sérieusement sur ses possibilités de conclure avec son beau notaire un peu coincé sur les bords que sur l’identité du mystérieux oncle italien qui lui a légué maison et jardin. Il faut dire aussi que jusqu’alors elle n’avait jamais trouvé sa place dans l’existence, ayant décidé de ne plus aimer ni se laisser aimer par personne depuis le double suicide de ses parents alors qu’elle était adolescente.

Mais ici, dans ce Castello hanté, au fil des rencontres et des péripéties, il se pourrait bien que son blindage commence à se fissurer. C’est une histoire d’amour bourrée de charme où l’on croisera des chats fantômes, des as du cambriolage, des notaires coincés, un aigle et une autruche, jolie pause enchantée au milieu d’un paysage magnifiquement décrit qu’on se plait à imaginer – et où l’on se trouverait volontiers en ce moment précis !

COMME UN ENCHANTEMENT, Nathalie Hug, Calmann Levy

Mattie doit se séparer de son petit garçon de trois mois pour s’occuper du bébé de sa maîtresse. Même si elle s’efforce de ne pas s’attacher, un lien très fort se développe entre la nounou et Lisbeth, la fillette, qui ne sera pas sans conséquence dans une Amérique au bord de la guerre de Sécession. Car si l’existence de Lisbeth est toute tracée (un mariage en grande pompe avec un beau parti de la région), son affection pour Mattie va venir bouleverser ses convictions.

Un roman très touchant sur l’amour que l’on peut porter à d’autres enfants que les siens et le désir d’évasion de femmes appartenant à des milieux opposés par l’Histoire.

LE CROCUS JAUNE, Laila Ibrahim, Charleston

Lire pour s’évader #3

Le jeune Maurice Swift ne rêve pas seulement d’être un écrivain, mais d’être un écrivain connu. Le problème c’est qu’il est incapable de trouver des idées et de bonnes histoires. Aussi lorsqu’il rencontre le romancier Erick Ackerman qui effectue une tournée pour parler de ses ouvrages, il profite des confidences du vieil homme tombé sous son charme pour s’inspirer de son passé, sans se soucier des conséquences…
J’avais déjà eu un énorme coup de cœur pour « Les Fureurs Invisibles du Cœur », le précédent roman de John Boyne, j’ai de nouveau été happée par cet « Audacieux Monsieur Swift » où il est cette fois question de création et de pouvoir.
Maurice est un personnage de la pire espèce : ambitieux, arriviste, arrogant, calculateur… Doté d’un charme dont il abuse, il parvient à vampiriser chacune des personnes qu’il jugera utiles à sa carrière, parvenant à les manipuler parfois jusqu’au drame avec un cynisme qui laisse pantois. Un vieux monsieur pétri de remords, une épouse au talent naissant… la personnalité de Swift est dessinée du point de vue des « victimes » qu’il a vampirisées et l’univers de l’édition où tout le monde se sert de tout le monde décrit avec une cruelle précision.

L’AUDACIEUX MONSIEUR SWIFT, John Boyne, JC Lattès

Joanne et Émile m’ont accompagnée pendant plusieurs jours, et j’ai retardé le moment de terminer le récit lumineux de cette épopée en camping-car. Emile, la trentaine, sait qu’il n’a plus beaucoup de temps devant lui, il prend alors la décision de partir loin de ses proches pour les protéger de la dégradation inéluctable de son état de santé, embarquant dans son escapade une parfaite inconnue toute aussi désireuse de fuir. Entre rencontres marquantes et découvertes de magnifiques paysages, voilà un roman prenant et particulièrement émouvant qui donnent des envies d’ailleurs… pour plus tard !

TOUT LE BLEU DU CIEL, Mélissa Da Costa, Carnets Nord (disponible au Livre de Poche)

Prenez soin de vous ❤

Lire pour s'évader #2

Depuis que son père est mort dans un accident de voiture en Colombie, Phoenix n’a plus touché à un piano, conséquence de la perte et de la colère, persuadée qu’il a trahi sa famille. Mais sa grand-mère la convainc de replonger dans ses souvenirs et de s’efforcer de pardonner. Elle découvre dans un walk man un message de détresse et un code à déchiffrer, car son père avait certes des choses à dissimuler, mais pas de celles qu’elle s’imaginait. Dès lors l’obsession de Phoenix va être de rendre justice, et pour cela elle va se découvrir un allié inattendu…
C’est l’union des étincelles qui peut provoquer un grand feu, c’est ce que raconte ce roman inattendu de Julien Sandrel (après La Chambre des Merveilles et La vie qui m’attendait) qui se lit comme un thriller (et si son père n’avait pas disparu dans un accident ? Et s’il en savait trop ?) traitant d’un scandale sanitaire très réaliste, mais aussi des risques pris par les lanceurs d’alerte. Entourée d’une sacrée bande de bras cassés comme elle le dit elle-même, des personnes qui n’ont rien à perdre, au fil des pages Phoenix se révèle être une jeune femme à la fois déterminée et très courageuse mais aussi blessée et sensible. Un beau personnage d’héroïne pour une enquête haletante.

Les Étincelles, Julien Sandrel, Calmann Levy

Lorsque le petit chat est arrivé dans sa famille, l’auteur ne s’attendait pas à ce qu’il prenne une place aussi immense – d’ailleurs il n’en voulait même pas de ce chat qu’ils sont allés chercher jusque dans cette campagne reculée de son enfance, cédant au sourire de sa fille. Mais il n’a pas résisté longtemps à la tendresse de cette petite boule de poils et à son opération de séduction. Seulement aujourd’hui le petit chat est mort, et il faut trouver les mots, si seulement il en existe.
Bien entendu le livre parlera à tous ceux qui partagent ou qui ont partagé un bout de vie avec un animal et connu le chagrin de le perdre – car non, ce n’est pas qu’un chat, ce n’est pas qu’un chien. Xavier de Moulins raconte tout ce qu’il a appris de son petit compagnon à l’existence trop brève, témoin de vie dont la présence à point nommé a apaisé la tristesse, la peur, le deuil, qui lui a appris à s’ouvrir aux autres et dont la disparition laisse un silence et un vide douloureux. Un très court livre qui se lit comme un poème doux et sensible. 

Le Petit Chat est Mort, Xavier de Moulins, Flammarion

1994. Sacha est reporter de guerre et se rend au Rwanda au moment où le pays s’embrase dans la guerre ethnique entre Hutus et Tutsi. Elle y fait la connaissance de Daniel, un médecin tutsi qui cherche à retrouver sa femme Rose et leur fils Joseph.
Tandis que Sacha découvre l’ampleur de la tragédie avec son œil de journaliste, au milieu du récit de l’horreur les pages d’un carnet retrouvé sont comme des pauses de douceur ; dans ces extraits au parfum de vanille, Rose raconte son enfance de petite fille muette, ayant grandi bercée par l’amour de ses parents qui vivaient et travaillaient pour l’ambassade de France, elle y raconte aussi sa rencontre avec Daniel et la naissance de leur enfant. Et puis, brutal, le basculement dans la terreur.
Alors que Sacha et Rose ne se connaissent pas, elles éprouvent le même besoin de raconter, alors même qu’il n’y a pas de mots assez puissants pour exprimer leur ressenti et leur peur, l’une pour crier au monde ce qu’il se passe dans un pays qui semble abandonné de tous, l’autre comme un message qui la lie encore au mari dont elle a été séparée, de la même façon que lui grave des fleurs sur les pans des murs. Laisser des traces, témoigner qu’on a vécu là, qu’aucune guerre ne pourra jamais complètement effacer un témoignage d’amour ou d’humanité. Deux femmes, deux points de vue différents sur le génocide, deux personnages forts dont les routes finiront par se croiser. Un roman bref et vraiment très marquant. 

J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de toi, Yoan Smadja, Editions Pocket

❤ PRENEZ SOIN DE VOUS ❤

Lire pour s’évader #1

En cette période inédite je vais continuer à vous proposer mes idées de lecture, puisque c’est dorénavant et plus que jamais l’un des derniers moyens les plus doux pour voyager. Les librairies et bibliothèques nous sont hélas inaccessibles mais il reste aussi la possibilité de lire en numérique (même si je sais bien que c’est loin d’être la préférence)… ou de se préparer une jolie liste pour « après » 🙂

Gros coup de 💙 pour l’histoire de Marie, 20 ans, serveuse dans un bar du Havre qui connait bien la galère au quotidien, entre les problèmes de fin de mois et un père à l’hypocondrie maladive. Quand elle rencontre Alexandre, elle se prend à rêver. Mais voilà l’amoureux qui se laisse aller à un brin de condescendance lorsqu’il réalise que Marie ne connait pas François Truffaut, et c’est le dérapage. Marie doit réparer avec de l’argent qu’elle n’a pas, alors elle tente le tout pour le tout en demandant de l’aide au juge qui l’a condamnée. Celui-ci lui propose alors un marché…
Est-ce que tout est joué d’avance parce qu’on n’est pas tous nés sous la même étoile ? une histoire est-elle vouée à l’échec parce que ses protagonistes ne sont pas du même milieu social ? Plusieurs mondes vont se confronter et apprendre à se connaître dans ce (trop) court et excellentissime roman qui m’a fait songer à un film tout au long de ma lecture, avec ses inoubliables personnages de juge mutique abritant quantité de secrets, de jeune bourgeois amoureux et surtout de cette jeune femme intelligente et sanguine qui va prendre sa vie en main.

Changer le Sens des Rivières, Murielle Magellan, Editions Pocket

J’ai passé un week end à dévorer cette incroyable histoire inspirée de faits réels : en 1943, un groupe de jeunes femmes se fait enrôler pour devenir les goûteuses d’Hitler, chargées d’ingérer en premier tout ce qui arrivera ensuite dans l’assiette du Führer. A chaque bouchée sous haute surveillance, la crainte d’avoir été empoisonnées. Et au-delà de cette situation délirante, la méfiance, la solidarité, l’humanité, la culpabilité, la volonté de survivre malgré tout et même la possibilité d’un amour. Marquant !

La Goûteuse d’Hitler, Rosella Postorino, Albin Michel

Pour finir une escapade gourmande en compagnie de La Pâtissière de Long Island, une histoire de transmission autour d’un… cheese cake à l’ingrédient magique qui adoucit les mœurs ! Les histoires croisées de Marie et de Rona à 70 ans d’écart, de l’Allemagne à New York, abordant des thèmes historiques plus graves qu’il n’y paraît. 

La Pâtissière de Long Island, Sylvia Lott, J’ai lu

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